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À qui incombe le traitement contre la prolifération des punaises de lit ?

Publié le 16/11/2023

Est-ce au propriétaire ? Au locataire ? Au syndicat des copropriétaires ? Amandine LABRO, Avocat au Barreau de Paris, nous éclaire sur la question à l'appui de la jurisprudence récente et nous livre ses recommandations.

 

La reconnaissance des infestations de punaises de lit est devenue un enjeu de santé publique. Selon un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), « la recrudescence des infestations de punaises de lit s’explique en partie par l’évolution de nos modes de vie de plus en plus nomades, par nos modes de consommation favorisant l’achat de seconde main et par la résistance croissante développée par les populations de punaises aux insecticides ».

En cas d’infestation d’un logement, il est nécessaire de procéder à des mesures strictes pour éviter la prolifération. Toutefois, qui doit prendre en charge le coût du traitement ? Le propriétaire, le locataire ou le syndicat des copropriétaires ?

Que dit la loi ?

Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 6).

Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière d’assurer au preneur une jouissance paisible de la chose louée (article 1719 du Code Civil).

En cas d’infestation de punaise de lit, le bailleur est donc dans l’obligation de payer les frais de désinsectisation.

Seul le coût des produits utilisés (produits chimiques) pour traiter les punaises pourra être récupéré sur les charges locatives, en plus du loyer. (VI. – Hygiène. Décret n°87-713 du 26 août 1987 pris en application de l’article 18 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière et fixant la liste des charges récupérables)

Néanmoins, en cours de bail, si le bailleur peut prouver que l’infestation par les punaises de lit est due à un manque d’entretien du locataire, il peut faire mettre à sa charge la désinsectisation du logement (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 7). 

Le locataire est en outre tenu de permettre l’accès aux lieux loués pour les travaux nécessaires à la désinsectisation par la société mandatée pour intervenir. Il doit également suivre les recommandations données pour traiter la situation et maintenir le logement exempt d’infestation (Arrêté du 16 février 2023 modifiant l’arrêté du 29 mai 2015 relatif au contenu de la notice d’information annexée aux contrats de location de logement à usage de résidence principale Annexe. Contenu de la notice d’information annexée à certains contrats de locations. 2.3. Obligations des parties en matière de lutte contre les nuisibles).

Enfin, le syndicat des copropriétaires peut être tenu responsable si l’infestation des appartements a son origine dans les parties communes.

En effet, l’article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 prévoit que le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation et l’amélioration de l’immeuble ainsi que l’administration des parties communes et qu’il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

Que disent les juges ?

Les décisions condamnant le locataire et/ou exonérant le propriétaire

  • Cour d’appel de Chambéry, 28 octobre 2010, n° 10/00527

Un locataire doit supporter le coût de la désinsectisation de son appartement infesté de punaises de lit car il était apparu que la présence de ces dernières était la conséquence d’un état de saleté résultant de l’insouciance du preneur.

  • Cour d’appel de Paris – Pôle 04 ch. 04 – 31 janvier 2017 – n° 15/07085

« Qu’en conséquence, le bailleur n’a pas manqué à son obligation de délivrance d’un appartement en bon état d’usage qui permettait une jouissance paisible des lieux ; que la présence des punaises dans les lieux résulte d’une cause étrangère au bailleur qui rend l’article 1719 du Code civil inapplicable en l’espèce puisqu’elle était imprévisible, extérieure à lui et irrésistible pour lui car il n’était pas en mesure de la prévenir ; qu’il ne peut être contesté que la société d’ HLM a fait preuve de diligences pour permettre une éradication des insectes, pour éviter leur propagation dans d’autres appartements et pour trouver un relogement de ses locataires ;

Que dès lors, en raison de l’absence de vice inhérent à l’appartement et de l’origine ignorée des insectes, l’appelante ne saurait être tenue d’ indemniser Madame N. et Monsieur F. ; que le jugement entrepris sera donc infirmé ; »

Les décisions condamnant le propriétaire

  • CA Aix-en-Provence, 20 janv. 2015 : JurisData n° 2015-000696

La présence de punaises de lit dans les lieux loués engage la responsabilité du bailleur et de son mandataire à hauteur de 2 000 € en réparation du préjudice moral subi par le preneur, outre le préjudice de jouissance, et entraîne la résiliation judiciaire du bail.

Il est également établi que le mandataire du bailleur avait connaissance de la nature et de l’importance de l’infestation de l’immeuble bien avant l’occupation des lieux par la locataire. Il aurait dû avertir la locataire des risques encourus par cette dernière. En conséquence, le mandataire a commis une faute de nature à engager sa responsabilité aux côtés du bailleur.

Les décisions condamnant le syndicat des copropriétaires

  • Cour d’appel de Paris du 9 décembre 2022, RG n° 22/07719

Injonction sous astreinte au  syndicat des copropriétaires et à son syndic, de communiquer sous astreinte : un historique précis avec justificatifs des interventions pour les trois dernières années, la copie du ou des rapports d’identification du problème et le compte-rendu d’intervention de la brigade canine pour identifier les foyers et responsabilités et traiter l’infestation, les coordonnées précises des propriétaires et locataires des appartements de la résidence.

Les recommandations

Aux syndics

S’il y a une suspicion d’infestation des parties communes, il convient de mettre en œuvre un protocole adéquat et ce, conformément à l’obligation d’entretien des parties communes du syndicat des copropriétaires.

Aux gestionnaires de biens et bailleurs

Faire preuve de diligence en cas de signalement par le locataire et ne pas tarder. Conserver des preuves écrites des diligences et demandes d’accès au logement.

Aux locataires

  • Entretenir le bien ;
  • Signaler sans délai toute invasion de punaises de lit ;
  • Permettre l’accès aux entreprises en charge de la désinfestation.

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